16 Août : Briançon – Chianale 71 km (2541 m de dénivelé)
Col de l'Izoard 2361 m – Col Agnel 2744 m

Réveil à 7h15 et surprise : le ciel est bleu, il fait beau. Petit-déjeuner avec des randonneurs à pied français et espagnol et déjà, les nuages arrivent. Nous partons donc soucieux avec les vêtements de pluie à portée  de la main. Nous descendons tout en bas de Briançon (sympa, la rue de la République en descente !) pour trouver la route de l'Izoard. C'est parti pour 20 kilomètres d'ascension. Vu les nuages noirs qui s'amoncellent, on ne devrait pas voir beaucoup de cyclistes sur la route. Après seulement 4 kilomètres, les premières gouttes. Ça y est, il pleut vraiment. Arrêt pour s'équiper en conséquence. Les nuages circulent très rapidement, plus que nous en tout cas. L'averse ne dure pas. L'air est d'une pureté cristalline, les paysages sont d'une netteté absolue. C'est grandiose ! Nous faisons la route avec un autre cycliste trouvé en chemin (nous en verrons d'autres plus loin, la pluie n'arrête donc pas les cyclistes !) et il se remet à pleuvoir.  Cette fois-ci, la pluie ne nous quittera plus jusqu'au sommet. Nous sommes finalement heureux de cette pluie. Elle ne nous gêne pas, elle nous enveloppe, histoire de mieux encore apprécier les éléments naturels qui nous entourent. Au détour d'un virage, nous apercevons un curieux attelage un peu plus haut. En nous approchant, nous constatons que c'est un « vélo » à 4 roues. La femme pédale devant et son mari (?) aux jambes immobilisées, pédale avec les bras à l'aide d'un système adapté. Ils ont le moral et sont contents de monter, toujours monter pour atteindre le col. Nous repenserons à eux tout au long de l'étape. Plus on monte, plus il fait froid. Normal ! Au sommet, nous enfilons tout ce que nous avons de plus chaud. Tiens, le conducteur de l'utilitaire norvégien rencontré la veille est en train de préparer le ravitaillement pour le groupe de cyclistes dont il s'occupe. Veinards ! Nous filons dans la descente : passage à nouveau par la Casse Déserte sous la pluie cette fois-ci. C'est toujours impressionnant mais moins que lorsqu'on arrive par l'autre versant. On descend prudemment et Château-Queyras se présente devant nos roues. Un château devait déjà exister à cet endroit vers les XIe ou XIIe siècles afin de protéger la vallée des pillards de Provence. Nous ne pillerons rien, nous stopperons uniquement pour satisfaire au rituel arrêt pour les courses du pique-nique et après 2 kilomètres de plat jusqu'à Ville-Vieille, c'est le début du col Agnel, col que je sais très dur surtout dans sa partie finale. Molines-en Queyras, avec ses maisons typiques en bois de mélèze et ses fontaines en bois,  est vite atteint. Ici, se situe la bifurcation pour aller à Saint Véran, la commune la plus haute d'Europe.
Nous continuons en direction de l'Agnel et nous décidons de nous restaurer dans un champ. Le bonheur : le soleil est revenu, il fait bon, on voit et on entend des marmottes (on les entend plus qu'on ne les voit d'ailleurs !). Que ça va être dur de repartir ! Il le faut quand même, mais la suite du col est interminable d'autant plus que l'on voit le sommet alors qu'il est à environ 12 kilomètres !  On discute avec un Italien qui vient de se faire monter en voiture et qui va redescendre en VTT. Le coupe-vent passé, on attaque une descente impressionnante jusqu'à Chianale, terme de cette étape : 950 mètres de dénivelé pour 9 kilomètres de descente. Des troupeaux de chèvres et de vaches au milieu de la route et Chianale se découvre alors à nos yeux. Image irréelle : tout le village est fait de pierres, les toits en lauzes. C'est magnifique ! Jusqu'au XIXe siècle, Chianale fit partie de la République des Escartons dont la ville principale était Briançon (dont l'influence était beaucoup plus importante que celle de Grenoble à cette époque), c'est pourquoi on trouve encore aujourd'hui une certaine influence française.
Nous trouvons notre gîte juste derrière l'église et sommes accueillis comme des rois par la propriétaire du lieu, une ancienne institutrice des quartiers nord de Marseille qui est venue s'installer ici il y a 15 ans environ. Cette halte restera comme un moment magique. Brigitte, c'est son prénom, est intarissable sur son village, les gens, etc... Elle nous explique, entre autres, que les habitants du coin souffraient souvent de rachitisme car ne s'alimentant qu'avec du pain et du lait. Ils ne voyaient des fruits et des légumes que l'été venu quand la famille partie en France remontait au village.

Aujourd'hui, ce coin est encore préservé car rude : l'hiver, n'y vivent que 10 personnes et l'été, peu de monde y vient, on n'y trouve qu'un minuscule commerce et un bar. Pour faire des courses, il faut aller à Cuneo à 75 kilomètres de là.
On sent bien que rien n'est gaspillé pour la nourriture, on se fait donc un plaisir de terminer la polenta maison (et non, raté pour les patates) ainsi qu'une omelette aux épinards... surtout constituée d'épinards ! Succulent ! A la nuit tombée, nous faisons un tour dans le village et pouvons admirer les intérieurs à la fois typiques et cossus de certaines maisons. Nous allons nous coucher, ravis d'avoir découvert ce lieu complètement hors du temps.

 

Vers la dernière étape.