Trebinje / Требиње (Bosnie-et-Herzégovine) – Dubrovnik (Croatie)

 

 

Aujourd'hui, nous quittons la Bosnie-et-Herzégovine, la destination du jour résonne comme une promesse de paysages grandiloquents mais croates : Dubrovnik.

 

Nous quittons la douceur de notre épais matelas végétal pour le poste du petit-déjeuner qui se situe, ce matin, au bord de la rivière. Adieux bien sympathiques avec nos hôtes, toujours perchés sur leur balcon.

 

Comme l'étape du jour sera courte, nous n'hésitons pas à passer du temps en ville, flâner au marché où nous achetons du pain, des fruits et du fromage. A bien observer le comportement des badauds qui nous observent alentour, nous sommes à n'en pas douter l'attraction du lieu : nous sommes assurément les seul.e.s touristes non slaves (voire non serbes) de la ville.

 

Dernier café sur la place ombragée. Le temps défile si lentement que nous en profitons pour écrire et envoyer quelques cartes postales.

 

Nous quittons la ville. Rond-point : Herceg Novi / Херцег Нови (MNE – ce qui signifie "Macédoine") et Dubrovnik / Дубровник (CRO) tout droit, Ljubinje / Љубиње et Mostar / Мостар à droite. Nous filons tout droit en empruntant un pont enjambant la rivière. Les traces de la guerre nous rattrapent : des traces d'explosions d'obus en plein milieu de la route, des panneaux localisant précisément les zones encore minées dans la région.

 

Nous nous rapprochons de la Mer Adriatique, la végétation a bien changé. Je la qualifierais volontiers de "méditerrano-méditerranéenne". Des buissons épineux, des pins et des roches blanches se découpant sur un ciel bleu d'un bleu si bleu que seule la sécheresse de l'air peut l'autoriser. Whaouuuu !!! Au détour d'un virage, la mer ! Nous savourons (je me rends compte que nous aurons passé beaucoup de temps à savourer … !) cet instant magique. Nous sommes toujours en Bosnie-et-Herzégovine mais plus pour longtemps. Nous dominons les flots à quelques trois cents mètres d'altitude. Malheureusement, la montagne est totalement défigurée par la construction quasiment chaotique de résidences que nous trouvons plus hideuses les unes que les autres, ce qui ne doit évidemment pas être le cas des promoteurs et des potentiels acheteurs ! Des résidences comme celles qui ont fini de dénaturer la Côte-d'Azur avec quelques décennies d'avance. On comprend bien l'intérêt qu'y trouvent les entrepreneurs et les agents immobiliers : nous sommes en Bosnie avec son niveau de vie bien bas mais aussi à dix kilomètres environ de Dubrovnik. De quoi être gagnants sur toute la ligne !

 

La douane. A vélo, nous doublons une file de véhicules de plusieurs kilomètres. Un coup de tampon sur le passeport et hop ! Descente (ou plutôt descente puis montée puis descente) sur Dubrovnik.

 

Arrêt sur le parking en bord de route duquel sont sûrement prises toutes les photos de Dubrovnik que tout le monde connaît : Une vue en plongée sur la vieille ville entourée de flots aux bleus intenses.

 

 

Sans trop tarder, nous cherchons un camping. Beaucoup de chambres à louer (proposées en anglais ou allemand, on se demande bien pourquoi !) mais un seul camping dans toute la ville. Coup de massue pour le prix, le plus cher camping dans lequel je n'aie jamais mis les pieds. Il faut dire que toute l'Europe semble s'être donnée rendez-vous ici !!

 

Montage de la tente et zou ! Direction les salles de bain dans lesquelles je réponds à l'appel pressant du rasage de tête. Idée saugrenue quand il s'avère que le seul rasoir que je possède coupe aussi bien qu'un ... mouchoir ! Après moults efforts, seule une moitié de mon crane est à peu près glabre. Je m'escrime ... sans succès et retourne, ridicule, retrouver Karin pour lui montrer les "dégâts" ! De quel maladie puis-je être atteint ? Un demi-cancer ? La pelade ? Hop, j'enfile une casquette et direction la plage ! Demain, il me faudra acheter un rasoir qui coupe ! Karin se baigne pendant que je laisse mon esprit divaguer. Nous n'avons encore rien vu de la ville mais une petite musique insidieuse me dit et me répète que je ne suis décidément pas fait pour les endroits envahis par les touristes !

 

Séchée (pour Karin) et dispos (pour les deux), nous partons à vélo en direction du centre-ville, celui des cartes postales, des reportages touristiques que tout un chacun a déjà vu au moins une fois. Nous cadenassons les vélos à une grille et, à pied, dévalons une volée d'escalier vertigineuse. Nous déambulons dans la ville à la tombée du jour ; comme nous l'imaginions, les ruelles et les places sont, bien entendu, bondées. Impossible d'apprécier l'architecture des lieux dans ces conditions. Trop de monde ! Trop de restaurants ! Trop de bars ! Nous mangeons une part de pizza dans la rue, à la recherche de ruesmoins fréquentées. Peine perdue ou presque ! Je me hâte de photographier un coin de ruelle sans personne. Un exploit ! La présence de nombreux chats égaient toutefois notre errance crépusculaire. Une fenêtre ouverte, des stores vénitiens, un tee-shirt rouge sèche dans l'air chaud du soir, image furtive d'une vie qui pourrait être paisible.

 

Nous avons vu Dubrovnik ! Voilà !

 

Une image me revient à l'esprit : celle tirée du documentaire der Kilometerfresser datant des années 20 du siècle précédent (le XXe quoi !). Il relate l'épopée d'un motard parti de Luzern pour un périple à travers l'Europe de l'Est. Son arrivée au cœur de Dubrovnik est accueillie par un unique enfant sautant dans tous les sens tel un cabri, enthousiaste à la vue de cet étrange équipage. Une autre époque ! Le capitalisme est passé par là, accompagné de sa cohorte de dommages collatéraux dont le tourisme de masse.

 

Nous ne nous sentons décidément pas touristes mais plutôt voyageurs !

 

 

De la même manière, je me rappelle, lors de notre précédent voyage à destination d'Istanbul, notre arrivée à Budapest où la pression des touristes m'avait également assailli. Oh, certes, pas dans les mêmes proportions, la ville étant plus étendue mais se retrouver entouré de photographes en short (même si je n'ai rien contre les shorts !), appareil en bandoulière et s'exprimant en anglais, français, italien, allemand,... fut un choc après des jours passés à Mosonmagyaróvár, Györ, Tata, Tatabanya, Zsámbék, … des endroits plus reculés de Hongrie.

 

De retour au camping, je passe quelques temps avec deux Slovènes voyageant à vélo. Ils m'expliquent qu'ils ont roulé pendant plusieurs jours avec un Français qui doit les rejoindre ici ce soir. Le voilà justement !

 

Il me raconte, volubile et heureux de parler français, qu'il vient de finir ses études et part pour un tour du monde. Les présentations terminées, nous nous enquerrons mutuellement de nos régions d'origine. On apprend que nous sommes tout deux Franc-Comtois, tous deux Jurassiens. Mes parents habitent à Lons-le-Saunier, les siens à dix kilomètres de là. Un des Slovènes nous fait comprendre que, pour un peu, nous aurions pu être de la même famille !!

 

Sur ce bon mot, il est temps d'aller se coucher.

 

Que retenir de cette journée ? Que la route parcourue à vélo ne nous apporta qu'une grande bouffée de bonheurs, car peu fréquentée, variée et agréable. Que Dubrovnik vaut le coup d’œil. Mais qu'il vaut mieux ne pas pénétrer à l'intérieur de l'enceinte de la ville en été. Rideau !

 

 

 

Dubrovnik (Croatie) – Bijela (Monténégro)

 

 

Lever à 6h30 ce matin. Comme nous avons "dérivé" vers l'Est depuis le début de notre périple, nous nous rapprochons inexorablement de l'endroit où le soleil se lève. Les journées sont décalées : lumière du jour de 5 heures du matin environ jusqu'à 20h30, jamais plus tard. Ainsi, malheureusement, pas de longues soirées à admirer, reposé.e.s et heureux/heureuse, le coucher de soleil que l'on pourrait trouver si poétique ...

 

A 6h30 ce matin-là, la colonne de mercure a déjà atteint la graduation 29°C !

 

On quitte la ville de Dubrovnik dans le bruit, la pollution, la circulation. Sensation mitigée : il fallait qu'on y passe mais, assurément, il aurait fallu que nous soyons là à une autre période de l'année.

 

Nous longeons la côte adriatique qui ressemble comme une sœur à la méditerranéenne du côté de la Côte-d'Azur : urbanisation (moins étouffante toutefois) et une vie tournée exclusivement vers le tourisme et les plaisirs maritimes.

 

Nous arrivons à proximité de Ćilipi, l'aéroport de Dubrovnik. Arrêt dans un supermarché pour se libérer de nos derniers kuna pendant qu'un avion Easyjet est en train d'atterrir pour libérer une nouvelle horde de touristes encore blancs de peau. Dans quelques kilomètres le Monténégro et ses ... Euros. Eh oui, au même titre que le Kosovo, ce pays a la chance (!!!???) d'utiliser cette monnaie, fierté de l'Europe économique. Je suppose que cette mesure fut imposée par l'Union Européenne pour bien montrer aux Serbes qu'ils ne sont pas (plus) ici chez eux et qu'ils peuvent bien garder leur pauvre monnaie dont personne ne veut.

 

Expérience vécue à la frontière serbo-bulgare l'année précédente. Je me souviens d'avoir dû visiter quelques banques de Vidin, en Bulgarie, afin de changer des dinars serbes en lev bulgares. Ce ne furent que sourires peinés, regards moqueurs ouconsternés sur ma minuscule liasse inchangeable.

 

- Et non, monsieur, vous ne trouverez personne en ville qui voudra bien vous racheter ces dinars m'avait annoncé l'employé de banque

 

- Désolé, inutile de chercher, avait rajouté le vigile à ma sortie de l'établissement.

 

Finalement, ce sera, quelques jours plus tard, dans les sous-sol de la gare de Sofia, qu'ils changeront de mains à un taux ridicule.

 

 

Un vent sournois a décidé de ralentir notre progression en s'unissant à un soleil toujours féroce. Gruda, dernière "ville" croate avant la frontière. On s'arrête à l'ombre d'une station-service.

 

De ce poste d'observation, des bribes de vies se déroulent sous nos yeux. Le fou furieux du coin va venir et repartir une dizaine de fois avec sa voiture affreusement tunée qu'il fait rugir (inutilement !!) tel un fauve métallique! Des Italiens viennent prendre de l'essence, ils sont 5 à crever de chaud dans une minuscule voiture ! Je ne les envie pas et je m'en amuse.

 

Fin de Croatie, un peu la fin du monde.

 

Quels que soient les pays, les zones frontières distillent immanquablement un parfum particulier, un parfum indéfinissable de bout du monde ... comme si les efforts pour se montrer présentable étaient inutiles vu que l'on sait, ici plus qu'ailleurs peut-être, que le monde court à sa perte.

 

Terrassé.e.s par la chaleur, nous n'attendons même pas que le soleil quitte son zénith pour repartir. 13 heures, 39°C. Dernière côte à 7% (tout est pénible sous cette chaleur) et voici la douane. Une de plus. Celle-ci est monténégrine. Les occupants des automobiles, pour entrer dans ce pays, doivent s'acquitter de 10 euros, une sorte de "taxe écologique" !!!! Descente sur Igalo et Herceg Novi. Je m'arrête brusquement, l’œil attiré par un pochoir de la vélorution, le même que celui peint sur mes sacoches, en plein milieu d'une affiche vantant une marque de cigarettes. Voilà Herceg Novi maintenant. Il est l'heure de s'enquérir d'un endroit tranquille où installer la tente. On demande à une mamie volubile dont on ne peut, malheureusement, plus se défaire. Un coup sur la tête ? Une tentative d'étranglement ? Elle semble, à n'en pas douter, heureuse de nous expliquer en long, en large et en travers ... qu'elle ne peut décidément pas nous aider ! Tout cela en nous faisant profiter de moult détails sur toute sa famille !

 

Nous n'avions assurément pas besoin de ça, là et maintenant, la chaleur nous ayant bien ramolli le cerveau et mis les nerfs à fleur de peau.

 

De nouveau seul.e.s, nous en profitons pour nous engueuler un peu. Un café et une bière (payés au prix fort et en euros, serait-ce pléonasmique ?) plus tard, nous remontons sur nos destriers plus très fiers pour les dix derniers kilomètres de l'étape. Nous longeons maintenant la Boka Kotorska (les bouches de Kotor en français).

 

Même si utiliser ce terme semble constituer un abus de langage, puisqu'il ne semble s'appliquer qu'à la Scandinavie, c'est ce fjord, le seul d'Europe du Sud, que notre route longera dans les jours prochains ... et plus longtemps que prévu, mais nous ne le savons pas encore !

 

 

Arrêt à Bijela. Ouf !!!

 

On trouve un minuscule camping coincé entre la route et les eaux du golfe clair. Bondé, le camping. On s'installe tout à côté d'une famille polonaise. Baignade réparatrice dans l'Adriatique non loin de chantiers navals et face au massif montagneux du Lovcen. Traverser le camping nous apprend beaucoup sur les activités des occupants : bavarder (dans des langues que nous ne comprenons pas), préparer à manger, manger et se baigner. Les vacances ordinaires de Monsieur et Madame Ordinaire, ici comme dans beaucoup d'autres endroits en Europe.Pas de jugement, juste un constat.L'Internationale du camping et du campeur.

 

La douche et le pique-nique plus tard, j'ai juste le temps de me raser ce qu'il me reste sur le crâne avant de m'écrouler de sommeil sur mon tapis de sol pendant que Karin (c'est du moins ce que je suppose) est partie pour sa balade digestive.

 

Le type de journée dont on ne gardera plus tard que les côtés plaisants (que l'on n'aura pas ressentis sur le coup !).

 

 

 

Bijela (Monténégro) – Stoliv (Monténégro)

 

 

Réveil matinal ... en tout cas avant celui du soleil. Nous ne connaissons pas exactement l'heure qu'il est mais nous nous en moquons ce matin. Nous suivons notre rythme, un peu comme des Siffre dans leur propre grotte extérieure. Nous prenons notre cuisine portative (les deux sacoches avant) et décidons de l'installer sur une sorte de jetée au bord de l'eau. Un grand-père et son petit-fils partent à la pêche, les cannes à l'épaule. L'eau est étale, le soleil, caché pour l'heure par le massif montagneux du Lovcen, nous envoie des preuves de sa présence : des rais orangés irradiant un ciel encore sombre en cette aube d'un jour nouveau. L'air frais semble s'être "purifié" en même temps qu'il nous a "lavé" la tête. Comme une nouvelle naissance, un nouveau départ, la tête et le corps vidés des tensions et des noirceurs d'hier. Une nouvelle page blanche à remplir de nouvelles aventures ; non pas remplir comme un boulimique se remplirait mais plutôt comme l'esthète le ferait par petites touches agréablement choisies et donc vécues intensément.

 

En bord de jetée, les pieds ballants juste au-dessus de l'eau, le regard à la fois dans le vide et dans l'attente de l'apparition du soleil par-dessus la crête, nous savourons sans rien dire cet instant et le petit-déjeuner tous les deux, autant l'un que l'autre.

 

Le nombre de kilomètres à parcourir me fait qualifier l'étape du jour de petite. Courte serait plus adapté car nous la rêvons grande, forte en émotions dans un paysage unique. Pas pressé.e.s de partir, nous laissons "monter" le désir, laissons nos sens se préparer à accueillir ce que nous aimons pour l'instant imaginer.

 

Faire le tour des bouches de Kotor, progresser, avancer pour arriver quasiment à son point de départ (à vol d'oiseau), seulement séparé.e.s de celui-ci par la largeur de l'embouchure d'environ 1 kilomètre : vivre des expériences, se savoir transformé.e.s mais arriver à un point différent, de sorte que l'on peut prendre conscience du chemin parcouru. Un exercice de vie plutôt qu'un exercice de style.

 

Nous ne sommes d'ailleurs pas les seul.e.s à nous laisser envahir par la beauté quasi irréelle des lieux. En effet, dans son livre Les Bords de l'Adriatique et du Monténegro, Charles Yriarte, écrivait lors de son arrivée dans les bouches qu’elles "sont certainement un des plus beaux lieux de la terre ; jamais plus singulière fantaisie de la nature, éclat plus terrible, manifestation plus violente de ses forces secrètes, en modifiant sa surface à une période de l’âge du globe, n’a donné à un coin du monde un aspect à la fois plus aimable et plus grandiose. Si je voulais caractériser cet aspect par des rapprochements à la portée des voyageurs les plus sédentaires, je comparerais les sinuosités que la Méditerranée forme aux subtils détours du lac de Côme, et, pour la coloration, je rappellerais celle des montagnes du lac Majeur." Nous sommes en 1878 et, finalement, rien n'a changé !

 

 

Le départ. Des barques de pêcheurs jouent à se mirer dans l'eau limpide des bouches, imitées par les parois verticales des montagnes environnantes. Arrêt à Perast. Ville qui n'a gardé de sa richesse et sa puissance passées que dix-sept palazzi et seize églises (ou l'inverse !). L'horloge du plus haut clocher marque définitivement 4h00. L'heure du glas de cet influent passé ? L'heure d'envoyer quelques cartes postales en tout cas. Une boîte aux lettres jaune "Pošta – Crne Gore" plus tard et voici dès lors quelques informations vitales (!?) qui vont parcourir une partie du globe.

 

Alors que nous sommes assis en terrasse devant un café fumant, le manège d'un homme attire mon attention. Est-ce la belle vie que de commencer son travail à 9h00 pour déplacer un panneau annonçant les départs des petits bateaux permettant de "circumnaviguer" autour des deux îles trônant au milieu des bouches ... et d'attendre ensuite l'arrivée hypothétique de touristes ? Je ne saurais répondre mais je sais qu'à ce moment-là, notre vie à nous vaut largement la sienne !!

 

Encore quinze kilomètres avant la ville de Kotor, terme supposé de cette étape. Nous cherchons à étirer le temps à son maximum afin de faire durer le plaisir. Jouissif !

 

Malheureusement (serais-je tenté de dire !), Kotor approche : son port qu'encombre un paquebot immense, paquebot ayant certainement déversé sa cargaison de riches touristes à la découverte des ports européens (Monaco, Venise, Gênes, Dubrovnik, …, Marseille – Oh ! Non ! Pas Marseille ! Trop dangereux, trop sale, trop prolétaire !), sa citadelle, ses remparts courant dans la montagne, sa vieille ville blottie entre l'eau et les parois rocheuses. Bref, de quoi être classée haut la main au patrimoine mondial de l'UNESCO.

 

LA carte postale parfaite !

 

Devant les remparts, je garde les vélos pendant que Karin découvre l'intérieur de l'enceinte. A son retour, nous discutons quelques instants avec deux jeunes cyclistes Fribourgeois en route pour Istanbul. Tiens, tiens ! Que de souvenirs !

 

On dégote un petit camping neuf kilomètres plus loin, à Stoliv exactement. Après avoir installé la tente, la proximité de l'eau nous incite à la baignade et au pique-nique sur la jetée.

 

Nous rencontrons un ingénieux globe-trotter belge qui a trafiqué son side-car pour transformer la partie passager en énorme caisse métallique dans laquelle sont entassés pêle-mêle une pelle, un jerrycan d'essence, ses affaires de camping et tout le nécessaire pour son voyage au long cours.

 

 

La fin de l'après-midi approchant, nous décidons de prendre les vélos pour retourner à Kotor. En chemin, nous choisissons de nous arrêter dans un restaurant. Le premier depuis 23 jours ! Non pas que cela nous manquait, juste pour le plaisir (?) de retrouver une nappe, des vraies assiettes, des vrais couverts et une vraie serviette. Je me souviens que Karin prendra du poisson alors que j'oublierai ce que contenait mon assiette. Rien de mémorable en tout cas ! Objectivement, le pique-nique, c'est nettement mieux !

 

A pied dans Kotor, nous digérons en "admirant" les vitrines des magasins de luxe : parfums, bijoux, vêtements. Autant d'incitations pour la fièvre acheteuse qui est en train de nous saisir. Non ! Je rigole !! On s'arrête dans un petit bar à l'écart et nous demandons la carte des boissons. Karin boirait bien un rakija et moi une bière. Je consens pour une fois à l'accompagner mais la liste des rakija est si longue et incompréhensible que nous ne savons lequel choisir. Nos hésitations se dissipent avec la réponse assurée de la serveuse : "this one is the best rakija". Va pour le meilleur rakija de l'établissement !

 

Il est temps de retourner se coucher maintenant. Demain, le départ est prévu matinal car les lacets menant au massif du Lovcen nous attendent.

 

Retour de nuit par cette route étroite serpentant le long de l'eau. Nous admirons furtivement les remparts à présent éclairés qui forment comme une auréole au-dessus de la ville.

 

 

Une journée positivement mémorable. Assurément !

 

Le soleil est couché depuis longtemps, à nous de disparaître dans nos sacs de couchage.

 

 

 

Journée à Stoliv (Monténégro)

 

 

Les vomissements de Karin me réveillent au beau milieu de la nuit. Maux de ventre, nausée. Ce réveil brutal me fait prendre conscience de mon propre mal de ventre. Quelques temps plus tard, c'est donc à mon tour de vomir ce qui ne veut décidément pas être digéré.

 

Comme un ballet bien réglé, nos sorties sont régulières mais successives ! Au moins, on ne se marche pas sur les pieds !

 

Aux relents nauséeux et nauséabonds qui encombrent notre goût et notre odorat, il fait peu de doute que "the best" rakija soit pour beaucoup dans notre état maladif.

 

Le soleil levé, nous sommes incapables de sortir de la tente, vidé.e.s, épuisé.e.s, anéanti.e.s.

 

Le temps chaud et humide n'arrange rien, bien au contraire.

 

Après un long travail de motivation et d'auto-persuasion, je trouve en moi les quelques "forces" juste nécessaires pour sortir et parcourir à pied les 50 mètres me séparant d'un petit commerce : une bouteille d'eau gazeuse sous le bras droit, une autre de Coca-Cola sous le gauche, retour à la tente.

 

Un vieil homme passe tout doucement à vélo à ma hauteur. Je me sens si mal que j'en viens même à me demander comment il est possible de monter sur un vélo, d'appuyer sur les pédales, … Tout me fatigue … même de réfléchir ! Karin passe la journée à dormir tandis que j'essaie, le cerveau en compote, de lire quelques pages.

 

Je cherche à interpréter ce prétendu signe... Quelle signification lui accorder ?

 

Que nous avons trop tiré sur la corde, physiquement parlant ? Qu'il est temps de se vider du superflu pour mieux se remplir plus tard ? Que la route du Lovcen (que nous attendions avec impatience) doit se faire apprécier et que nous n'étions pas prêt.e.s ? Ou, plus prosaïquement, qu'il ne faut jamais faire confiance à une serveuse monténégrine ? …

 

 

En tout cas, le constat est rude pour nous deux : zéro énergie plus zéro énergie égal journée pathétique et mortifère sous la tente. Les minutes passent dans un brouillard vaporeux, les heures passent dans un brouillard cotonneux, la journée passe dans un brouillard brouillardeux. En fin d'après-midi, l'orage gronde. Des bourrasques aussi violentes que brusques annoncent les quelques gouttes qui vont daigner nous arroser.

 

Elles suffiront cependant pour tout "laver", tout assainir : le bleu du ciel est maintenant plus bleu, le vert des prés et des forêts est maintenant plus vert, les rochers sont plus rochers, … Nous concernant, ça n'est toujours pas la grande forme !

 

 

De toute façon, il fait nuit maintenant. Après une journée à ne faire que dormir, il est temps d'aller … se coucher !!

 

Aujourd'hui, nous étions le mercredi 10 Août 2011, nous avons parcouru … 0 kilomètres et n'avons rencontré personne ! Peut-être un peu de nous-mêmes quand même !

 

 

 

 

 

Stoliv (Monténégro) – Rijeka Crnojevica (Monténégro)

 

 

Ce matin, le ciel arbore de nouveau un bleu cristallin que viennent iriser quelques rayons que le soleil envoie par delà les chaînes de montagnes derrière lesquelles il se trouve encore caché.

 

Nous allons mieux ce matin, nous pouvons vaquer à nos traditionnelles occupations matinales même si nous avons la sensation que tout se fait sur le fil du rasoir et qu'il suffirait du moindre petit dérèglement pour que l'on replonge. Nous nous affairons comme dans … un film passé au ralenti.

 

Nous réussissons à partir avant le lever du soleil pour parcourir la plus belle route d'Europe. Rien que ça ! C'est en tout cas ce que j'avais lu sur certains sites narrant des voyages dans cette région. On verra bien …

 

Nous demandons notre route à un cantonnier à la sortie de Kotor. Il est tout heureux de nous aider. L'ascension commence. Cette route fut construite par les Austro-Hongrois afin de relier Kotor à Cetinje, alors ville importante de la région. Chef-d’œuvre du génie civil, la route empile les lacets au nombre de vingt-cinq les uns au-dessus des autres. Facile à suivre, ils sont numérotés ! On se croirait dans le passo Pordoï, le passo Stelvio ou la montée de l'Alpe-d'Huez pour les numérotations ou dans la montée de l'ancienne piste du col de Tende côté français pour l'empilement quasi parfait des virages en épingle les uns au-dessus des autres.

 

Le paysage est effectivement époustouflant. Sans que la pente ne soit jamais trop forte, nous nous élevons, au sens propre comme au sens figuré et profitons d'un panorama sans cesse renouvelé sur les bouches de Kotor. Kotor justement n'est plus qu'un minuscule point en contrebas et le paquebot qui, tout à l'heure, bouchait la vue, une maquette ridicule qu'un coup de vent pourrait faire s'envoler.

 

 

Le titre de plus belle route d'Europe n'est décidément pas usurpé même si je la placerais ex-aequo avec le Sella Ronda dans le Südtirol. L'enchaînement Passo Campolongo, Passo Pordoï, Passo Sella, Passo Gardena n'a d'égal, à mon avis, nulle part ailleurs en Europe quant aux beautés des paysages traversés.

 

Les 25 lacets passés, nous voici arrivé.e.s, sourires aux lèvres, à la bifurcation de la route menant au parc du Lovcen. Nous décidons de faire une pause bien méritée. Avant de repartir, il nous faudra choisir : soit poursuivre l'ascension pour atteindre quasiment le sommet du Lovcen à 1500 mètres d'altitude ou alors descendre directement vers Cetinje.

 

Le temps de le réflexion est occupé par le pique-nique (mieux vaut prendre des décisions le ventre plein !) suivi d'un café turc commandé dans le café-restaurant situé à proximité.

 

Nous avons choisi de … monter encore plus haut évidemment ! La route est droite mais la pente est rude … comme aurait dit Raffarin. Le parc du Lovcen semble un paradis pour les randonneurs à pied. En tout cas, nous rencontrons de nombreux panneaux indicateurs signalant directions et temps de marche. Que dire du paysage ? Il nous avait déjà coupé le souffle … Il ne lui reste plus rien à couper ! La cerise sur le gâteau.

 

Des vendeurs de miel et de produits typiques le long de la route, quelques touristes garés non loin de là.

 

Nous atteignons le sommet du col … qui ne porte pas de nom... encore une fois ! Malgré cela, un sourire immense, encore un, barre nos visages respectifs. La pitoyable journée d'hier n'a pas altéré notre bonheur du jour, elle en a même décuplé les effets.

 

Karin décide de s'arrêter là afin d'admirer plus attentivement l'anatomie d'un âne qui semble bien heureux seul dans son champ ... Pendant ce temps, je poursuis l'ascension menant quasiment au sommet de la montagne par une route en cul de sac. Je croise Chris, un jeune Allemand à vélo sur la route d'Athènes.

 

Je continue l'ascension. Un parking, beaucoup de monde, un escalier pour atteindre le sommet, la vue sur les montagnes monténégrines et albanaises. Je n'ose croire que l'Albanie est déjà là, si proche alors que tout nous poussait et nous pousse encore à l'imaginer si lointaine. Redescente.

 

Je retrouve Karin qui a également parlé avec Chris. Il étudie à Delft, aux Pays-Bas, et ses parents, originaires de RDA, habitent maintenant Munich.

 

Cette ascension nous a permis de vivre un moment unique, il faut maintenant passer à autre chose : la descente sur Cetinje. Longue, longue descente. Cetinje. Petite ville de 15 000 habitants, elle fut longtemps la capitale de Monténégro. Elle reste aujourd'hui le siège de la résidence présidentielle et possède de nombreuses ambassades, ce qui ne manque pas d'étonner dans un endroit si charmant mais isolé.

 

Nous constatons, comme à Stolac ou dans d'autres villes dont j'ai oublié les noms, que les terrasses des bars concourent pour le prix de la plus bruyante musicalement … même si musicalement est un terme un peu surfait puisque nous sommes abreuvé.e.s, encore une fois, de "turbofolk", cette autre atrocité ( moins apocalyptique certes … quoique …) que l'on associe aux Balkans modernes.

 

Un homme vient nous accoster : il est bosniaque, de Banja Luka, se nomme Milos, nous a doublé en voiture alors que nous montions ce matin. Il est enthousiaste et volubile, ses bras n'arrêtant pas de mouliner l'air. Il veut absolument se faire prendre en photo avec nous, il veut absolument que nous lui envoyions des photos dès notre retour. Il est si heureux et euphorique que nous partageons ces sentiments avec lui.

 

Il nous quitte en levant sans arrêt les deux pouces en signe de félicitation.

 

Rencontre assez irréelle en tout cas …

 

Nous ne savons pas vraiment dans quelle direction poursuivre notre route. Coup d’œil sur la carte : un lac immense nous tend les bras … pour peu qu'un lac ait des bras ! C'est le Skadarsko jezero (en monténégrin) ou Liqeni i Shkodrës (en albanais). Autrement le lac de Shkodër en français du nom de la principale ville albanaise qui le borde même si celui-ci se partage entre les deux pays sus-cités. A son extrémité nord, lovée près de méandres de la Rijeka Crnojevica, ronronne le village de Rijeka Crnojevica. Point de chute du jour. C'est décidé ! Après une descente sur une route très étroite, nous pénétrons dans le bourg endormi par une entrée bien sinistre : les maisons tombent en ruine, les rares voitures garées tombent en ruine, un chien famélique traverse la rue et le commerce dans lequel nous entrons est le plus glauque que nous ayons rencontré jusque là. On tourne la tête à droite : la rivière, une promenade aménagée, un pont majestueux, un restaurant chic en terrasse. Village aux deux visages.

 

Un peu plus loin, un champ au bord de l'eau fera office de lieu de campement. Nous disputons la place avec les nombreux hérons. Des bateaux-taxis parcourent la rivière, un canoë y glisse silencieusement.

 

A peine installé.e.s, nous voyons arriver … Chris qui nous demande s'il peut partager notre lieu de villégiature. Quelle question ! La nature n'appartient à personne, en tout cas pas à nous.

 

Nous continuons la conversation juste initiée plus tôt dans l'après-midi. Nous partageons le repas, savourons cette soirée inattendue. Nous montons la tente alors que Chris choisira de dormir à la belle étoile seulement isolé de l'humidité par son sac de couchage.

 

Nos ennuis de santé de la veille sont maintenant oubliés et ce sont nos deux visages sereins qui accueillent la nuit alors que le reste de nos corps sont déjà bien cachés au fond des sacs de couchage.

 

Aujourd'hui, nous étions le jeudi 11 Août 2011, nous avons parcouru … 80 kilomètres (avec environ 1500 mètres de dénivelé positif) et avons rencontré tout un tas de personnes !

 

Que de changements depuis hier !

 

 

 

Rijeka Crnojevica (Monténégro) – Podgorica (Monténégro)

 

 

La nuit aurait pu être idyllique si un pêcheur n'était venu en voiture jusqu'au bord de l'eau. Son arrivée nous réveilla … mais nous nous rendormîmes. Heureusement !

 

A notre "vrai" réveil, celui que nous avons voulu, nous constatons que la voiture est arrêtée à quelques centimètres de Chris couché dans l'herbe haute et donc quasiment invisible ! Ouf !!

 

 

Aujourd'hui rien ne presse : un rapide coup d’œil à la carte nous a appris hier soir que Podgorica n'est distant que d'une trentaine de kilomètres et que, cette ville se trouvant dans une plaine, nous aurons plus à descendre qu'à monter.

 

Chris, pour sa part, projette de contourner le lac par le sud et d'entrer directement en Albanie. Nous profitons de ces derniers instants communs pour augmenter notre capital de photos.

 

Nous apprenons également que le village où nous sommes faisait office de résidence d'hiver pour les princes de la région fuyant les grands froids de Cetinje.

 

 

Tranquillement, nous attendons que les rayons du soleil viennent lécher et sécher la tente. Le temps pour nous de prendre quelques photos.

 

L'étroite route que nous empruntons dès le départ s'élève légèrement si bien qu'elle offre un panorama époustouflant (encore !!!) sur la rivière Rijeka Crnojevica. Des collines boisées, des bords de rivière recouverts de nénuphars vert clair, l'eau bleue, des méandres artistiquement dessinés et, de-ci de-là, quelques bateaux-taxis. Je comprends pourquoi la même photo que celle que je suis en train de prendre depuis ce parking se retrouve sur tant de brochures touristiques vantant les charmes du Monténégro.

 

Un peu plus loin, Karin se fait une belle frayeur en apercevant un énorme serpent au milieu de la route. A ses dires, il l'a entendue immédiatement, a bondi de manière impressionnante et s'est sauvé sans demander son reste.

 

Nous quittons cette agréable route ignorée de la circulation automobile pour rejoindre maintenant la route principale, la 2-3, reliant Podgorica à Cetinje. Le lien entre l'ancienne et la nouvelle capitale du Monténégro. Arrêt Coca-Cola dans une station-service (à ce qu'il paraît, la boisson idéale pour un estomac encore affaibli). Nous atteignons le bord du plateau : en bas, la plaine s'offre à notre regard. Au second plan, en face, les montagnes albanaises. A gauche, on entrevoit les montagnes du Durmitor, fameuses pour les randonnées mais aussi pour le canyon de la Tara, le plus profond du monde après celui du Colorado. Nous gardons tout cela pour un futur autre voyage… Une longue et jouissive descente plus loin, un immense panneau vieilli annonce "PODGORICA – Dobrodošl – Welcome". Les faubourgs de la ville présentent une succession d'immeubles d'habitations et de bureaux, certains assez anciens, d'autres plus modernes, certains en béton coloré et d'autres en structure tout en verre. Les grues de chantier pullulent. On sent bien la ville en plein développement.

 

Nous peinons à trouver le centre. Il s'avère qu'il n'en existe pas vraiment. De grandes artères sans charme, quelques commerces, un pont haubané pompeusement dénommé "du millénaire", blanc et si moderne que sa présence semble anachronique. Sûrement le délire de quelque homme politique local servilement accompagné par un architecte prétentieux et avide autant d'argent que de reconnaissance !

 

Nous occupons un banc afin de nous restaurer chichement avec ce qu'il nous reste … c'est-à-dire quasiment rien. Ce sera sans aucun doute le repas le plus pitoyable du voyage ! Tout y est : des restes ni frais ni bons, une vue sur des immeubles de bureau sans charme, une large avenue sur laquelle des bus poussifs disputent à quelques Lada le plaisir de polluer.

 

Ce soir, nous sommes hébergé.e.s par Milos avec qui nous avons rendez-vous à 15 heures sur la place principale.

 

Vu le temps qu'il nous reste, nous cherchons un commerce. Un sympathique jeune homme à vélo nous accoste et nous propose de nous aider … et même de nous héberger. Nous lui expliquons notre situation et rejetons son offre à regret. J'apprendrai au retour en France que je l'avais contacté via Couchsurfing et que, désolé, il m'avait répondu que cela ne lui serait pas possible de nous héberger car il ne serait peut-être pas là à cette date !! Finalement, il était là !

 

Malgré notre refus gêné, il nous indique, pas rancunier, l'adresse d'un supermarché.

 

Je suis alors accosté par un jeune homme chargé du nettoyage des rues. Il prend le temps de cesser son travail pour parler vélo avec moi. Il m'explique qu'il a déjà vécu en Italie. C'est d'ailleurs en italien que nous conversons. Je parle de notre voyage … qui le laisse assez incrédule ! Comme beaucoup d'ailleurs ! Alors qu'il suffit de partir pour voyager loin puisque seul le premier pas compte … ou le premier tour de roue !

 

Karin, les courses terminées, se joint à la conversation. 14 heures 55. Pour une fois que nous avons un rendez-vous à honorer, nous allons essayer d'être ponctuel.le.s.

 

Nous devons repérer un chapeau blanc …

 

Le voilà ! Vissé sur une tête qui culmine à au moins deux mètres du sol ! Milos impressionne par sa carrure, sa prestance, … sa poignée de main qui a bien failli nous écraser à tous deux quelques doigts.

 

Il est en voiture, nous le suivons à vélo jusqu'à chez lui.

 

Il habite en périphérie, dans une petite maison qui fut, autrefois, au milieu des champs. Aujourd'hui, elle se trouve entourée d'immeubles modernes que l'on a toutefois eu le bon goût de peindre dans des couleurs originales : vert pomme, orange pétant, jaune canari, …

 

Par cette chaude journée, nous remarquons immédiatement la treille salvatrice. Malheureusement, nous ne restons pas sous son ombre bienfaisante puisque Milos nous fait entrer chez lui pour, comme tout bon hôte des Balkans (ou presque) le ferait, nous offrir le verre qui est à la fois celui de l'amitié et de la bienvenue : un verre de rakija !! Il est fier de nous montrer les nombreuses bouteilles de ce qui s'apparente pour nous désormais à un poison. Nous refusons gentiment … ce qui l'irrite au plus haut point. Ne comprenant pas vraiment si c'est de l'humour monténégrin ou du sérieux balkanique, nous nous entendons dire que si nous refusons de boire, il est inutile de rester plus longtemps chez lui. Gloups !!!

 

L'odeur déjà nous retourne le cœur et les tripes mais nous ne voyons pas d'autres solutions que celle d'obtempérer. Trop chaud pour parcourir maintenant le moindre hectomètre à vélo !

 

Quelquefois, contraints et forcés, nous agissons en sachant que nous courons à notre perte. En voilà un exemple édifiant …

 

 

Par la suite, nous essayons de donner le change mais le cœur n'y est plus, à attendre les premiers symptômes de la nausée qui ne va pas tarder à se manifester.

 

Comble de malheur, nous sommes vendredi et le vendredi c'est … soir de sortie ! Quel bonheur !

 

Milos nous propose de faire … la tournée des bars !

 

Youpi !!! Apéritif chez lui ! Rakija pour tout le monde ! Celui de bienvenu étant passé, nous n'y sommes plus tenu.e.s.

 

Avant de boire en ville, il faut quand même se restaurer. Il choisit une cabane à bürek. L'heure tardive et le taux de lipides d'un tel plat font que Karin ne mange rien. Pour ma part, ce sera surtout pour avoir quelque chose à vomir au cas où !

 

Allez, hop ! Premier bar ! Un concert aurait dû y être organisé mais, ouf !, Milos s'est trompé de semaine et le bar est fermé !

 

Deuxième bar ! La jeunesse branchée de Podgorica s'y retrouve : je n'ai même pas l'envie de boire une bière, c'est dire. Lui en prend une associée à un verre de rakija. Pour notre part, ce sera un café chacun ! Ridicule !

 

Il commence peut-être à se rendre compte de notre état lamentable, aussi nous propose-t-il d'écourter la soirée et de retourner chez lui. Nous acceptons en chœur. Encore aujourd'hui doit-il parler avec condescendance de ces deux voyageurs à vélo qu'il a hébergé.e.s, incapables de supporter la moindre goutte de rakija. Ah, ces gens venus de l'Ouest !!!

 

 

Nous nous couchons plein.e.sd'appréhension, en ayant bien pris soin de repérer le chemin le plus court entre le canapé-lit du salon dans lequel nous dormons et les toilettes.

 

Un dernier point positif … quand même : demain c'est samedi, notre hôte ne travaille pas et part très tôt faire du bateau sur le lac. Sa maison est à nous seul.e.s si bien que nous pourrons prendre le temps nécessaire pour émerger, petit-déjeuner, nous préparer et surtout n'aurons-nous pas à refuser l'éventuel verre de rakija du réveil !!!

 

 

J'allais oublier : j'ai aussi acheté ce jour des rasoirs jetables. Pour éviter de payer trop cher, j'ai opté pour des rasoirs d'une marque monténégrine : je me rendrai compte plus tard qu'ils rasent aussi bien que si je me passais … un doigt sur la barbe !!! Quand ça ne veut pas …