Lundi 7 Juillet : Les Marécottes - Saint Gervais (69 km)

 

Comme Xavier doit aller travailler tôt à Martigny, nous nous levons de conserve à 6h et quittons la maison de concert à 7h. Xavier vers la vallée, moi vers encore plus haut.

Très bien cette étape aux Marécottes : lieu mémorable et hôte vraiment sympa.

Le temps est couvert et gris ce matin ... La route que j'emprunte pour débuter la journée est goudronnée jusqu'au Trétien. Ensuite, je m'engage, comme Aimé 79 ans plus tôt, sur la route des Diligences : une piste non goudronnée serpentant dans la forêt et menant à Finhaut par une succession de lacets serrés.

Je suis seul ... évidemment et la magie, la féérie du lieu répondent au delà de mes espérances aux attentes que j'ai pu formulées sur cet endroit loin de tout.

J'arrive à Finhaut ... trop tôt à mon goût, j'aurais aimé que la magie se prolonge ! Et je suis tout de suite surpris par la présence d'énormes bâtisses : ce sont les hôtels qui ont fait la renommée du village au siècle dernier.

Aujourd'hui, ce ne sont plus des hôtels, juste des logements d'habitation.

Les décorations du village m'intriguent : des vélos un peu partout ... Et je me souviens que le Critérium du Dauphiné Libéré y est passé il y a quelques semaines de cela. Je m'arrête vers la Poste histoire de savourer et ... mon regard est attiré par une affiche présentant une exposition sur l'histoire du vélo en Valais. 8h30. Elle est évidemment fermée mais un numéro de téléphone est disponible pour les renseignements. J'appelle et tombe sur une gentille dame qui me dit de ne pas bouger, qu'il lui faut environ une demi-heure pour venir ouvrir la salle d'expo pour moi. Youpi !!!

Des vieilles photos, de vieux vélos ( celui de Roger de Vlaeminck, le vélo "de Gribaldy" de Sean Kelly, un vélo des années 30,...), des maillots,... et cette dame qui m'abreuve d'anecdotes, d'histoires plus ou moins intéressantes,...

Ravi de cette halte, je remonte sur mon vélo non sans un certain soulagement toutefois avec, pour seuls compagnons, les bruits des oiseaux dans la forêt !

 

Je descends maintenant sur le Châtelard par une route qui, d'après la carte de 1935, n'existait pas encore. La douane. On rend sa caution à Aimé. A moi, on ne ne rend rien puisque, comme avant Genève, les bureaux sont déserts. Je n'aurai donc laissé aucune trace de mon voyage en Suisse. Mais aussi vite cette remarque m'est-elle venue à l'esprit qu'il m'a tout de suite fallu la contredire. Je ne saurai par exemple jamais où Aimé a dormi à Genève puisqu'il ne l'a pas écrit dans son carnet. Par contre, avec mon téléphone portable ou les caméras de vidéosurveillance omniprésentes, quelqu'un, dans 79 ans, pourra retrouver l'exact tracé de mon parcours ainsi que la totalité de mon emploi du temps. C'est donc cela la modernité ?

Je pense à tout cela en gravissant le col des Montets ; une joggeuse me salue, je la salue, je m'amuse de la pancarte "téléskis de la Poya" : le même nom que celui du quartier de Fontaine où j'habitais encore en début de semaine. Et le sommet est atteint. Des randonneurs japonais partout et le Mont-Blanc qui se découvre ainsi que des glaciers impressionnants. Même si je suis habitué aux paysages de montagne, je ne peux qu'être émerveillé par ce décor. Mais comment se fait-il qu'Aimé n'en ait pas parlé du tout ? Rien ! Même pas une allusion ... Brouillard ?, nez dans le guidon toute la journée ? (car je commence à comprendre que ce voyage, au vu de la longueur des étapes, a tout sauf été une agréable escapade en dilettante !)

Je vais faire quelques courses (dont un morceau de Comté doté d'un ... antivol ! Je rêve ... Je rêve à une autre modernité !) et pique-nique sur la première place venue entouré de Japonais surtout. Il se met à pleuvoir, je m'équipe en conséquence pour poursuivre ma route mais la pluie est trop forte : je fais une halte et m'endors quelques instants sur un banc devant la Poste des Houches.

Un ami d'un ami doit m'héberger ce soir sur la commune de Passy. J'y arrive à 15h30 et commence à demander si quelqu'un connaît la rue. Personne. Je traînouille et attends ... 19h30. J'ai enfin la réponse : tout en haut du village. Personne dans la maison. J'attends encore jusqu'à 20h30 où une voisine m'apprend que mon hôte n'est pas là en ce moment (alors que nous nous étions mis d'accord au téléphone auparavant). Je reprends donc la route et file jusqu'à St Gervais où je me paie une place en gîte puis une pizza puis une bière. Non mais ... !!

Aimé, lui, a choisi de dormir à Chamonix : "Je commence à être las et j'apprécie la descente vers Chamonix où j'arrive à 18h 15, mouillé comme une soupe plus de sueur que de pluie.

 Je prends un bain très chaud, rends visite aux amis et dors comme je n'ai pas dormi depuis mon départ."

Moi aussi, je dors bien (comme depuis le départ d'ailleurs, comme depuis toujours d'ailleurs !) seulement réveillé par intermittence par le tonnerre qui gronde.